De plus en plus d’élus locaux abandonnent leur mandat, à deux ans des prochaines élections municipales. Un ex-maire pousse un cri d’alarme.
C’est une tendance qui se confirme sans que cela fasse grand bruit. Un nombre croissant de maires ont démissionné depuis leur élection de 2014. A mi-mandat, ils sont 55 % de plus par rapport à la précédente mandature, selon un décompte réalisé par l’AFP.
Parmi eux, figure Philippe Rion, élu sans étiquette à Castillon (Alpes-Maritimes) en 2008 et réélu en 2014. Il a jeté l’éponge en février dernier, usé de devoir tailler dans les finances de sa commune. Redevenu citoyen classique à 62 ans, l’ancien édile, qui vit toujours à Castillon, revient pour nous sur sa décision six mois plus tard et appelle à se battre pour l’avenir des communes.
Pourquoi avez-vous quitté votre mandat ?
La principale raison est qu’un maire est totalement désarmé. On n’a plus aucun moyen de travailler et l’État, qui devrait nous aider, joue dans le camp adverse et nous met des bâtons dans les roues. Il y a d’abord eu la baisse drastique des dotations, qui est un problème terrible, surtout pour les communes rurales qui sont particulièrement fragiles. C’est dramatique quand on nous ampute notre dotation globale de fonctionnement (DGF) de 50 %, mais même quand on nous enlève un euro! Si encore on avait des aides de l’État… Mais c’est le contraire : on nous baisse les dotations mais ou nous demande en même temps de plus en plus de choses.
Comment avez-vous fait depuis votre première élection en 2008 ?
J’ai dû économiser sur tout, jusqu’à l’essence des véhicules municipaux. J’ai aussi été le seul maire à ne plus faire les commémorations (1er mai, 11 novembre, 14 juillet etc.). Mais un maire rural est totalement inaudible : on en a parlé trente secondes dans quelques médias et puis c’est tout ! Sauf que la population est en droit d’avoir certains services et donc vous vous retrouvez très vite dans des situations très compliquées, d’autant que ma commune est particulièrement difficile. Mon second mandat a très mal démarré car ça a été particulièrement tendu à partir de 2014. J’avais été obligé d’augmenter la taxe d’habitation de 20 % en 2015. Une des solutions aujourd’hui serait d’augmenter la population mais ce n’est pas évident.
Comment vivez-vous votre décision de démissionner, avec six mois de recul ?
Je dors mieux la nuit ! Je le vis bien, je suis très soulagé même si je suis aussi très en colère. Désormais, je vais mener mon combat différemment. A chaque fois que ce sera possible, je vais faire entendre ma voix dans le débat politique. Mais c’est le Français qui se révolte, pas le maire ! Je ne défends pas particulièrement mon mandat mais plutôt ma commune car c’est le bien des Français. Ces derniers devraient se révolter et s’intéresser à ce dossier car on leur enlève un morceau de patrimoine.
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