« Dans les hautes sphères, on ne tarit plus d’éloges sur toutes les personnes qui jouent un rôle essentiel en cette période. Une partie d’entre elles manifestaient chaque samedi. »
Qui n’a pas remarqué que beaucoup de caissières, d’infirmières, d’aides-soignants, ou d’instituteurs, d’éboueurs, des chauffeurs livreurs, des « serviteurs à la personne » aidant les vieillards, défilaient dans les manifestations des Gilets jaunes ?
Ne sont-ce pas ceux-ci et celles-là qui nous sauvent en ce moment ? Mal payées, non considérées, ayant du mal en fin de mois, elles font depuis un mois le plein d’éloges de la part de ceux qui, depuis trois ans, dix ans, vingt ans, gouvernent et favorisent les riches.
Ils ont délocalisé des usines de fabrication des médicaments à l’étranger pour gagner plus de ronds. Ils ont diminué les impôts des plus riches… L’avidité reine et son copain, sa majesté fric, ont défendu l’économie libérale, la compétition amorale, la destruction de la planète, favorisé les lobbys, engendré le toujours plus, l’hyperconsommation débridée, la paupérisation des classes populaires, en somme les citoyens qu’on maltraite et oublie depuis plusieurs décades, pour privilégier… les plus favorisés.
Quand les gens ne courent plus partout, dans tous les sens, qu’ils sont obligés de se poser, ne se posent-ils pas les questions essentielles, du style : « Quel sens j’ai donné à mon existence ? À part courir au travail ou en vacances, qu’est-ce qui est important pour moi ? »
Les Gilets jaunes, celles et ceux qui nous permettent de survivre alors qu’ils manquent de tout, partout, les plus modestes au service de tous, qui ne comptent ni leur temps ni leur peine sont soudainement encensés par les puissants, les adorateurs du paraître, les esclaves des plaisirs sensoriels, qui ouvrent enfin les yeux sur l’essentiel, ce qui donne du sens à nos vies. Pourra-t-on, après-demain, quand les confinements, les virus, et la (grande) misère des soignants s’arrêteront, continuer à vivre comme avant, continuera-t-on à polluer, à exploiter l’homme par l’homme, à enrichir quelques-uns, à privilégier le chacun pour soi, à refuser de partager, à ne rechercher que le plaisir individuel en oubliant les besoins de tous, et le bien commun… ?
Comme j’ai écrit un ouvrage qui a pour titre Les valeurs humaines peuvent-elles sauver le monde ?, je ne peux que répondre par la phrase du romancier Gilbert Cesbron : « Demain est le prénom de l’espoir ! » et penser que la spiritualité peut sûrement sauver la matérialité, que notre sagesse intérieure va préparer le postmatérialisme.
Courrier des lecteurs | Source : ouest-france.fr
Photo XAVIER LEOTY / AFP