Après la seconde attaque visant une mosquée en moins d’une semaine dans l’agglomération lyonnaise, de nombreux représentants de cultes, associations et élus se sont rassemblés le vendredi 14 août à 15h pour dire non à la haine anti-musulmans.
Un restaurant tenu par un homme musulman originaire du Maroc, la mosquée Omar de Bron, puis la mosquée Essalem, seule mosquée du deuxième arrondissement de Lyon. En moins d’un mois, la communauté musulmane de l’agglomération lyonnaise a été la cible de trois attaques. L’incendie de la mosquée Essalem, survenu dans la nuit de mercredi 12 au jeudi 13 août, a frappé cette salle de prière qui se trouve au rez de chaussée d’un bâtiment résidentiel de 5 étages en plein cœur de Lyon.
Ce vendredi, jour sacré pour les musulmans, la prière du vendredi s’est déroulée dans le gymnase Louis Chanfray, mis à disposition pour les fidèles pour cette prière en l’absence d’une autre mosquée dans le deuxième arrondissement. Puis, à 15h, un rassemblement comparable à celui qui s’est tenu à la mosquée Omar la semaine précédente était organisé devant la mosquée Essalem sur la rue Delandine. C’est devant plus de 200 personnes que 14 prises de paroles se sont suivies, sous la modération de Hafid Sekhari, président du comité de soutien à la mosquée Essalem et co-auteur d’une tribune parue dans Libération le 30 juin dernier, et condamnant la haine anti-musulmane.


Le secrétaire général de la mosquée est le premier à prendre la parole. Il adresse une partie de son allocution aux autorités auxquelles il accorde sa totale confiance et remercie toutes les personnes présentes pour leur soutien. En effet, de nombreux élus et des représentants du culte judaïque, du diocèse de Lyon et de l’Eglise Protestante Unie de France ainsi que la Ligue des Droits de l’Homme et la Licra étaient présents pour manifester leur soutien à la communauté musulmane.
Se suit la prise de parole de Jaafar Greinch au nom de la mosquée Omar de Bron, qui assure tous les cultes de son soutien et de celui de sa communauté, car il estime, comme de nombreuses autres personnes ayant pris la parole après lui, que les auteurs de ces attaques ne sont pas seulement anti-musulmans, mais qu’ils « visent la communauté nationale ». Azzedine Gaci, recteur de la mosquée de Villeurbanne, prend ensuite la parole au nom du Conseil des Mosquées du Rhône. Il a déploré le peu de condamnations par la classe politique à la suite de ces attaques criminelles et le peu de couverture médiatique, affirmant qu’il « ne saurait y avoir de hiérarchisation » des violences raciales en fonction de l’appartenance religieuse ou ethnique des victimes ou des auteurs. Mohamed Moussaoui, président du CFCM, a également pris la parole et a livré une réflexion sur le langage et sur l’utilisation du mot « islamisme » pour parler de l’extrémisme de certains musulmans. Ce terme, qui il y a quelques années était seulement associé à l’islam, est aujourd’hui employé d’une manière qui, selon lui, crée un rapprochement faux et dommageable entre l’idéologie extrémiste de certaines personnes et la religion qu’est l’islam. Il déplorait également que la pensée raciste et islamophobe ait « pignon sur rue » dans certains médias de par la présence régulière de certains « spécialistes » sur les plateaux télé.
« Il n’y a qu’une seule communauté, la communauté nationale »
Jacques Dumortier, Ligue des Droits de l’Homme.
Après ces prises de parole de représentants de la communauté musulmane, des représentants d’autres cultes ont manifesté à tour de rôle leur soutien à la communauté musulmane à ce rassemblement. Le Grand Rabbin de Lyon Richard Wertenschlag, Mgr Michel Dubost du diocèse de Lyon, Etienne Tissot de l’Eglise Protestante Unie de France et Marcel Dreyfuss, président du consistoire israélite de Lyon, ont à tour de rôle pris la parole et présenté un front commun contre la haine. Ils ont appelé à créer des liens entre leurs trois cultes afin de faire prévaloir la paix et l’entente.
Ces nombreux dignitaires religieux ont laissé la scène à Jacques Dumortier qui représentait la Ligue des Droits de l’Homme, association qui a accueilli dans ses locaux la conférence de presse qui a suivi le rassemblement et que vous retrouverez sous cet article. Après lui, de nombreux élus de la république se sont succédé au micro. Cyril Isaac-Sibille, député de la deuxième circonscription du Rhône était le premier élu à prendre la parole, suivi par Thomas Dossus, conseiller métropolitain, Pierre Oliver maire du deuxième arrondissement et enfin Florence Delauney, adjointe droits et égalité, mémoire, cultes et spiritualités, représentant le maire de Lyon Grégory Doucet.
Si la classe politique, les associations antiracistes, et la couverture médiatique n’étaient pas au rendez-vous la semaine précédente comme le déplorait Azzedine Gaci, ces formations semblent avoir répondu à l’appel de la communauté musulmane après cette deuxième attaque. Bien plus de médias étaient présents pour couvrir le rassemblement. La Licra était cette fois-ci présente en la personne de Guy David, SOS Racisme a également envoyé un message de soutien. Alors que ces deux associations avaient été silencieuses après l’attaque de la mosquée Omar. La veille du rassemblement, une réunion entre de nombreux responsables du culte musulman, comme Mohammed Moussaoui et Cengiz Kalayci, et la préfecture s’est tenue afin de parler sécurisation des lieux de culte.
Ce qui pourrait expliquer ce front républicain et cette prise de conscience collective, Cengiz Kalayci, président du CRCM, le résumait bien lors de la conférence de presse : « Brûler une mosquée, c’était déjà un choc pour la population. Mais en brûler une deuxième, c’est une provocation à l’endroit de la République.«
Amjad Allouchi pour #Droitcitoyen