En 2018 et 2019, plus de 40 000 personnes ont été condamnées pour divers infractions et délits « sur la base de lois vagues », dénonce l’organisation.
Les violences policières dénoncées par des manifestants en France ont largement été médiatisées. Mais cette fois c’est « l’acharnement judiciaire » dont ils feraient l’objet que dénonce Amnesty International. Dans un rapport accablant, publié mardi, l’organisation pointe du doigt un système destiné à « réprimer » des personnes qui, souvent, n’ont pas commis d’infractions.
En 2018 et 2019, plus de 40 000 personnes ont été condamnées pour divers infractions et délits « sur la base de lois vagues », fréquemment « utilisées pour restreindre illégalement les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’expression », affirme l’ONG.
Son rapport de 56 pages est documenté pat des dizaines de cas de manifestants pacifiques « arrêtés arbitrairement » et « victimes d’acharnement judiciaire », selon Amnesty, pendant la période de mobilisation populaire des Gilets jaunes et contre la réforme des retraites.
« Je ne faisais que relayer des messages »
Frédéric Vuillaume, responsable syndical de Force ouvrière et Gilet jaune de la première heure à Besançon, raconte ainsi une « descente aux enfers » pour lui et sa famille, qui n’avaient pourtant jamais eu affaire « ni à la police, ni à la justice » avant les manifestations de novembre 2018.
« C’est vrai que j’ai une grande gueule et que quand je parle au mégaphone, on m’entend, mais ça ne fait pas de moi un criminel, je n’ai jamais commis aucune violence », assure cet agent d’entretien de 48 ans. « Je ne faisais que relayer des messages sur Facebook appelant à la mobilisation, comme tout le monde », dit-il. Mais la préfecture et le parquet ne l’ont pas entendu de cette oreille. Accusé d’être un des « meneurs » du mouvement dans sa ville, il aurait dû, selon eux, déclarer les rassemblements.
Gardes à vue, perquisitions à leur domicile, convocations au tribunal… Un long cycle de « coups de pression » et d’« intimidations » qui va durer deux ans a alors démarré pour le militant et ses proches. Jugé trois fois pour entrave à la circulation et outrage à personne dépositaire de l’autorité publique – il avait crié « Castaner assassin » lors d’un déplacement du ministre de l’Intérieur de l’époque – Frédéric Vuillaume a été interdit de manifester et condamné à payer au total huit amendes.
Sa femme a été mise en examen à deux reprises et son beau-fils de 22 ans, au casier judiciaire vierge, a écopé en février 2019 d’un an de prison dont six mois ferme pour avoir lancé un pétard mortier.
« Faire des exemples »
« Les violences lors des manifestations sont une préoccupation légitime, mais il y a une volonté politique de faire des exemples et dissuader les gens de descendre dans la rue », affirme Marco Perolini, chercheur pour la France à Amnesty International.
Source : leparisien.fr