Le Conseil d’État donne un délai de trois mois au gouvernement pour justifier que ses efforts sont conformes à une réduction des émissions de gaz à effet de serre, un des objectifs de l’Accord de Paris. C’est « une décision véritablement historique pour la lutte contre la crise climatique » souligne l’Affaire du Siècle. Cette décision fait suite à une requête faite par la commune de la Grande-Synthe.
La commune de la Grande-Synthe, près de Dunkerque, a saisi le Conseil d’État, plus haute juridiction administrative, après s’être vue refuser des mesures supplémentaires visant à respecter les objectifs de l’Accord de Paris. La commune du Nord est soutenue par les villes de Paris et Grenoble ainsi que des organisations de défense de l’environnement telles que Notre Affaire à Tous, Oxfam, Greenpeace ou encore la Fondation Nicolas Hulot.
Dans un premier temps, le conseil d’État juge cette requête recevable d’autant qu’au vu des dépassements des plafonds d’émission de gaz à effet de serre de la France ces dernières années, il demande au gouvernement de justifier de son action climatique. Dans trois mois, celui-ci devra rendre des comptes en démontrant que les mesures prises sont suffisantes pour être compatibles avec les objectifs fixés d’ici 2030.
Dans le cadre de l’Accord de Paris, signé le 12 décembre 2015, la France s’était engagée à réduire de 40% ses émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030 par rapport à l’année 1990. L’ancien ministre de l’écologie Nicolas Hulot avait fixé la neutralité carbone à 2050. Tous ces objectifs n’avaient qu’un caractère incitatif, mais le gouvernement joue sur l’apparence lointaine de ces horizons (J’réfléchis et j’ai pas d’idée, garde le terme que tu préfères) pour ne pas en faire des priorités, obligeant le conseil d’État à le mettre face à ses responsabilités en rappelant le caractère obligatoire du droit. Dans trois mois, après l’évaluation des politiques publiques au regard des enjeux climatiques, le conseil d’État pourra ordonner à l’État d’agir concrètement sur des points précis s’il juge ses actions insatisfaisantes. Cette insuffisance était déjà pointée du doigt en 2018 lorsque 2,3 millions de citoyens ont signé une pétition portée par l’Affaire du Siècle demandant un recours en justice contre l’État pour « inaction climatique »
En juin dernier, Emmanuel Macron s’était engagé à appliquer 146 des 149 recommandations de la convention citoyenne pour le climat. Le président avait usé de « trois jokers » sur la limitation de vitesse sur l’autoroute, la taxe sur les dividendes ou encore la modification du préambule de la constitution. Aujourd’hui, huit propositions ont été écartées et la plupart profondément amendées. En octobre 2019, l’ancien premier ministre Édouard Philippe avait constitué cette convention afin de répondre à la demande du mouvement des Gilets jaunes et du collectif écologiste les Gilets Citoyens. L’objectif premier était de sonder les citoyens quant aux décisions à prendre afin de respecter l’Accord de Paris et notamment « la réduction d’au moins 40% des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 » dans « un esprit de justice sociale ».