Le lundi 1er février, un groupe de soldats a mené un coup d’État en Birmanie contre le président constitutionnel Win Myint. Le chef de l’armée, Min Aung Hlaing, a reçu par transfert du vice-président le poste officiel de président par intérim et a déclaré un état d’urgence d’une durée d’un an.
Pour la première fois depuis au moins une décennie, on voit converger les forces pro-démocratiques, qui sont pour la plupart issues du cœur de l’ethnie bamar, avec les mouvements de « nationalité ethnique » d’autres régions du pays, en opposition directe à la bureaucratie obscure qui les opprime toutes deux depuis longtemps. Les militaires de leur part, disent qu’ils organiseront des élections « libres et équitables » une fois l’état d’urgence terminé.
Qu’est-ce qui a conduit au coup d’État militaire en Birmanie ?
Le Parlement devait tenir sa première session pour approuver les élections du 8 novembre dernier, au cours desquelles la Ligue Nationale pour la Démocratie, le premier parti civil du pays, a remporté 83 % des sièges disponibles. Néanmoins, les militaires ont refusé d’accepter les résultats du vote, qui a été largement considéré comme un référendum sur la popularité de Aung San Suu Kyi, chef de la LND et qui est le leader civil de facto du pays depuis son élection en 2015.
La possibilité d’un coup d’État est apparue après que les militaires, le 26 janvier 2021, guidés par le général Min Aung Hlaing, avaient tenté devant la Cour suprême du pays de faire valoir que les résultats des élections étaient frauduleux, et ont menacé de « passer à l’action » avant d’entourer les chambres du Parlement de soldats.
Qu’est-ce qui s’est passé ?
L’armée de la Birmanie a renversé le gouvernement démocratique du pays par un coup d’État le 1er février, en arrêtant les dirigeants civils, en coupant Internet et en interrompant les vols intérieurs et vers l’étranger. Ils ont rapidement pris le contrôle des infrastructures du pays, suspendant la plupart des émissions de télévision, selon les rapports.
Ce coup d’État a replongé le pays dans un régime militaire complet après une courte période de quasi-démocratie qui a débuté en 2011, lorsque les militaires, au pouvoir depuis 1962, ont organisé des élections parlementaires et mis en œuvre d’autres réformes. Dans ses premiers commentaires publics après le coup d’État, le général Hlaing a cherché à justifier cette prise de contrôle. Il a déclaré que les militaires étaient du côté du peuple et qu’ils formeraient une « démocratie véritable et disciplinée ».


Deux jours après que les troupes ont pris le contrôle du Parlement et d’autres institutions de l’État, des accusations criminelles ont été rendues publiques, accusant Daw Aung San Suu Kyi d’avoir violé une obscure loi sur l’importation. Ce geste a été largement perçu comme un prétexte pour la maintenir en détention. Alors que certains pays fêtaient la Saint-Valentin, des pirates informatiques ont attaqué un site web de médias d’État, le recouvrant de ce message militant : « Nous voulons la démocratie ! Rejetez le coup d’État militaire ! Justice pour le Myanmar ! »
L’avenir politique incertain de la Birmanie
La Birmanie ne connaîtra peut-être pas une telle vague de fond d’action politique déterminée avant de nombreuses années et c’est dans ces courtes fenêtres d’opportunité que des époques entières peuvent être façonnées. De nombreux « pourcentages de probabilité » et scénarios potentiels diffusés par les agences d’analyse des risques et les think tanks prédisent à tort un retour à une sorte de statu quo. Au-delà de cela, ils spéculent sur les chances de succès ou de défaite des manifestants, favorisant invariablement ce dernier. Mais ils déforment l’ampleur des bouleversements actuels et ignorent à quel point la plus petite des marges peut être significative dans des moments comme celui-ci. La question de savoir si les manifestations seront couronnées de succès n’est pas une question binaire. L’important est d’utiliser ce moment de changement inévitable pour faire en sorte que le nouveau règlement politique soit aussi ouvert et inclusif que possible. Chaque petite poussée dans les mois à venir pourrait avoir des répercussions qui durent des années.
Personne ne sait exactement quel type de règlement politique va émerger dans les mois à venir, mais un retour au statu quo semble impossible, les militaires ayant franchi d’innombrables lignes rouges aux yeux de multiples factions politiques.