Nike a récemment été accusé d’utiliser la main-d’œuvre Ouïghours dans des usines chinoises. La marque rejoint la longue liste des entreprises ayant recours à cette minorité dans leur processus de production. Le peuple Ouïghours reste soumis à la répression et à une totale surveillance du gouvernement Chinois.
L’association des Ouïghours de France a déposé plainte contre Nike le 24 février dernier pour “pratiques commerciales trompeuses” et “complicité de recel de biens provenant de travail forcé”. L’entreprise est accusée de subvenir directement ou indirectement au travail forcé des Ouïghours, au Xinjiang, à l’ouest de la Chine. Selon l’avocat de l’association Mourad Battikh, 9 800 travailleurs ouïghours auraient été transférés dans des usines affiliées à Nike depuis 2007.
Ce n’est pas la seule marque soupçonnée d’avoir recours à ce type de travaux forcés. Ainsi, selon l’ASPI, l’Institut Australien de Stratégies Politiques, 83 marques feraient appel à des usines de sous-traitance en Chine utilisant la main-d’œuvre Ouïghour. Parmi ces marques se trouvent des entreprises d’automobiles (Mercedes-Benz, BMW), d’autres liées à l’électronique (Apple, Samsung), mais les plus concernés sont surtout des marques de textiles (Nike, Adidas, Lacoste, H&M). Cela s’explique car la région est riche en ressources naturelles, et tout particulièrement en coton. En 2019, un cinquième de la production mondiale de coton a été produit au Xinjiang. Le président chinois Xi Jinping souhaite ainsi garder la mainmise sur ce territoire si stratégique.
Cependant, la région est composée principalement de Ouïghours, une population turcophone à majorité musulmane. Cela représente une différence de valeurs, de croyances et de langues, avec le reste du pays. Une différence qui fait barrière à l’unification du pays et au contrôle de la région très attractive.
Ainsi, le gouvernement chinois semble vouloir effacer peu à peu cette culture si différente de la culture traditionnelle chinoise. Le peuple Ouïghour est constamment surveillé : des checkpoints sont installés devant les mosquées, des systèmes de reconnaissance faciale sont placés aux endroits stratégiques, et des plateformes de renseignement très élaborées sont utilisées. Grâce à cela, le gouvernement chinois recueille la moindre information pouvant paraître suspecte. Ainsi, la détention d’un coran, la présence d’une application de prière sur son téléphone, le fait de ne pas manger de porc ou de se rendre régulièrement à la mosquée sont considérés comme des critères d’extrémisme religieux.
Selon une enquête du Monde, l’Etat chinois va même jusqu’à envoyer des cadres dormir dans les foyers Ouïghours, afin d’observer leur vie privée et détecter le moindre comportement 《 suspect 》. Sans oublier les nombreux attentats attribués aux Ouïghours, ayant eu lieu dans la région entre 2008 et 2016, qui n’ont fait qu’accentuer leur surveillance et leur répression.
Dès 2017, la Chine a commencé l’arrestation massive de plusieurs milliers de Ouïghours. Toute personne présentant des signes de « radicalisation » est arrêtée puis envoyée dans des camps d’internement. En 2019, le gouvernement américain a estimé le nombre de prisonniers à trois millions. Selon les témoignages d’anciens détenus, les Ouïghours y vivent dans des conditions de vie inhumaines. Les musulmans seraient obligés de manger du porc et de boire de l’alcool, et des femmes auraient été stérilisées de force.
La Chine se défend en indiquant qu’il s’agit d’une lutte contre le terrorisme et le séparatisme, mais en aucun cas un combat contre une minorité ou une ethnie. Les individus arrêtés seraient en réalité transférés dans des camps de formation professionnelle, afin de les éloigner de l’extrémisme religieux.
De son côté, la France a récemment dénoncé un système de répression mis en place par la Chine. Le ministre des Affaires Étrangères Jean Yves le Drian a ainsi déclaré devant le conseil de l’ONU du 24 février : « De la région chinoise du Xinjiang, nous parviennent des témoignages et des documents concordants, qui font état de pratiques injustifiables à l’encontre des Ouïghours, et d’un système de surveillance et de répression institutionnalisé à grande échelle ».