Ce mercredi 3 mars, le ministre de l’Intérieur Gerald Darmanin a annoncé une décision en conseil des ministres, de dissolution du groupe d’extrême-droite Génération Identitaire qui présente les caractéristiques d’ « une milice privée » qui incite à « la haine, la violence et la discrimination ».
La fin de toute une génération
Le groupe d’extrême droite Génération Identitaire, proche des adhérents du Rassemblement national, a été dissous mercredi en Conseil des ministres, après des années de polémiques et d’actions musclées notamment contre l’immigration et l’islam, qu’il appelle à combattre. Le mouvement a été dissous en conseil des ministres après plusieurs semaines de menaces de la part du gouvernement. En effet, la procédure de dissolution avait été lancée mi-février, un argumentaire avait été envoyé à Génération identitaire, qui avait jusqu’au 24 février pour y répondre.
Le ministre de l’intérieur explique sa décision, en évoquant dans un tweet que cette association « incite à la discrimination, à la haine et à la violence ». Gérald Darmanin a aussi décrit dans le décret de dissolution que « cette association et certains de ses militants doivent être regardés comme tenant un discours de haine incitant а la discrimination ou à la violence envers des individus en raison de leur origine, de leur race et de leur religion » et, « par sa forme et son organisation militaire », Génération identitaire « peut être regardée comme présentant le caractère d’une milice privée », ajoute-il.
Cette décision vient s’inscrire dans la continuité de la lutte contre les séparatismes prônée par le gouvernement. En effet, ces derniers mois, trois associations accusées d’être proches de l’islam radical, comme le CCIF (Collectif Contre l’Islamophobie en France) et Baraka City ont été aussitôt dissoute juste après le discours du Président de la République sur les séparatismes. Ces dissolutions ont précédé celle du groupe ultranationaliste turc des « Loups gris ».
Une génération pas si jeune que ça
Le mouvement a été créé en 2012, l’association revendique 2800 adhérents. L’association n’en est pas à son coup d’essai, et s’est faite remarquer par plusieurs actions coup de poing. L’ « acte fondateur », considéré comme tel par le mouvement, fut l’occupation spectaculaire du toit d’une mosquée en construction à Poitiers en 2017, accompagnée de slogans hostiles aux musulmans.Suite à cet événement, cinq militants de GI ont été d’abord condamnés en 2017 mais relaxés en juin 2020 en appel pour ces faits, jugés prescrits.
En 2019, GI avait occupé le toit de la caisse d’allocations familiales de Bobigny et déployé une banderole « De l’argent pour les Français, pas pour les étrangers ». Pour ces faits, 19 militants ont été condamnés en mars 2020 à des peines d’un à trois mois de prison avec sursis. L’association compte aussi à son actif l’agression de supporters turcs lors de l’Euro 2016 de football en France.
Mais cette fois-ci il semble que le mouvement ait franchi un cap. En effet, le décret de dissolution fait également état de « liens avec des groupuscules d’ultradroite dont (Génération Identitaire) reçoit un soutien logistique et qui défendent une idéologie appelant à la discrimination, à la violence ou à la haine au nom de théories racialistes ou suprémacistes ». Cette phrase fait écho aux dons reçus par GI de Brenton Tarrant, le tueur des mosquées de Christchurch en Nouvelle-Zélande, où il avait assassiné 51 personnes en mars 2019. Lors de son audition en avril 2019 par la commission d’enquête parlementaire sur les groupuscules d’extrême droite, l’ancien directeur de Tracfin (organisme public chargé de l’action contre les circuits financiers clandestins) Bruno Dalles avait affirmé que Brenton Tarrant était « membre bienfaiteur » de GI. Un fait accablant mais qui a mis du temps à donner lieu à des sanctions ou à une quelconque réponse de la justice ou du gouvernement.
La riposte
« Autant qu’un crime politique contre la démocratie, une faute morale contre le peuple français », a réagi sur Twitter l’avocat de Génération Identitaire Gilles-William Goldnadel. En effet, scandalisés par cette décision, les membres de l’organisation ont décidé de lutter par leurs propres moyens.
Dès l’annonce de sa dissolution, Génération Identitaire a indiqué sa volonté de contester la mesure devant le Conseil d’Etat, en déposant un référé-suspension.En d’autres termes, Génération identitaire demande que les effets de la dissolution ne soient pas immédiats et attendent la décision de la plus haute juridiction administrative pour être opérants. Car, en effet, étant dissous, le groupe ne peut plus organiser de manifestations ou d’événements. Une réponse positive à cette requête signifierait donc la possibilité pour GI de continuer ses actions militantes en attendant un jugement. Un arbitrage qui devrait intervenir dans un ou deux mois, précise Thaïs d’Escufon, porte-parole du mouvement. Néanmoins, le groupe n’envisage pas de mener d’actions même s’il y est de nouveau autorisé. « La bataille de l’activisme s’est achevée lors de notre dernière manifestation », assume la porte-parole. Pour le moment, le mouvement reste donc concentré sur la procédure contentieuse devant le Conseil d’Etat.