Le lundi 8 mars alors que le monde célébrait la journée internationale des droits des femmes, à Argenteuil, une jeune fille, Alisha, âgée de 14 ans est battue puis jetée à la Seine.
Selon les premiers éléments de l’enquête menée par le police judiciaire de Cergy, les auteurs présumés seraient un couple d’adolescents tout deux âgés de 15 ans et scolarisés dans le même établissement que la victime : le lycée professionnel privé Cognacq-Jay réputé, jusqu’alors, sans problèmes. Les présumés auteurs n’auraient, par ailleurs, pas d’antécédents judiciaires d’après le parquet de Pontoise qui a ouvert une enquête pour assassinat.
Selon la mère de la victime cette dernière subissait un harcèlement scolaire depuis plusieurs semaines combiné à un cyber-harcèlement dont l’instigateur serait l’un des présumés auteurs du meurtre également soupçonné d’avoir piraté le compte Snapchat de la victime et d’y avoir exposé des photos intimes de la jeune fille. A cet égard, un conseil de discipline devait avoir lieu le 9 Mars.
Ce drame est l’occasion de rappeler la nécessité d’agir davantage face au harcèlement, notamment au harcèlement scolaire, et au cyber-harcèlement, des fléaux prégnants dans notre société.
Des chiffres et des effets inquiétants
Chaque année 700 000 élèves sont harcelés avec des conséquences plus ou moins graves allant de l’échec scolaire aux traumatismes psychologiques profonds (anxiété, dépression, troubles du comportement alimentaire, insomnies …) pouvant les conduire jusqu’au suicide.
Les auteurs du harcèlement n’en sortent pas indemnes encore moins lorsqu’ils sont mineurs, ces derniers sont autant en souffrance que les victimes. En effet de nombreuses études soulignent l’expérience scolaire négative des auteurs de harcèlement ainsi qu’une tendance à adopter des comportements à risque pouvant aboutir à de la délinquance.
Le harcèlement scolaire, une forme de harcèlement moral pénalement répréhensible
Le harcèlement scolaire est reconnu par le législateur comme étant une forme de harcèlement moral qui est un délit pénal caractérisé par des propos ou comportements répétés, par une plusieurs personnes, à l’encontre d’une victime et ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de vie de cette dernière. Cette dégradation se traduit par une altération de la santé physique ou mentale de la personne harcelée.
En vertu de l’article 222-33-2-2 du Code pénal toute personne harcelant moralement une autre personne de plus de 15 ans, encourt jusqu’à 1 an de prison et 15 000 € d’amende.
En outre, le législateur a prévu de nombreuses hypothèses dans lesquelles la peine pourra être alourdie.
La peine est portée à 2 ans de prison et 30 000 € d’amende si :
- Le harcèlement moral a causé une incapacité totale de travail supérieure à 8 jours ;
- La victime est âgée de moins de 15 ans ;
- La victime est une personne vulnérable du fait de son âge, d’une maladie, d’une infirmité, d’une déficience physique ou psychique ou à son état de grossesse.
Il faut souligner ici que la vulnérabilité doit toutefois être apparente ou connue de l’auteur des faits ;
- Le harcèlement moral a été commis par l’utilisation d’un service de communication au public en ligne ou depuis un support numérique ou électronique ;
- Le harcèlement moral a été commis en présence d’un mineur qui y a assisté.
En outre la peine est portée à 3 ans de prison et 45 000 € d’amende lorsqu’au moins deux circonstances aggravantes sont réunies.
Le cyber-harcèlement, une forme aggravée du harcèlement
L’essor des nouvelles technologies de communication a permis l’expression de nouvelles formes de violence, parmi elles le cyber-harcèlement qui permet au harcèlement scolaire de se poursuivre en dehors de l’enceinte des établissements scolaires, ne laissant ainsi aucun répit à la victime.
Par ailleurs, le potentiel de diffusion sur internet étant beaucoup plus large et plus rapide, les conséquences de cette forme de harcèlement sont souvent plus graves. C’est pour cette raison que le législateur punit plus sévèrement le harcèlement lorsque celui-ci est réalisé par le biais de support numérique, donc le cyber-harcèlement.
De manière générale pour tout type de harcèlement, que ce soit pour le harcèlement scolaire ou le cyber-harcèlement, pour que les faits soient pénalement répréhensibles, il faut que les éléments constitutifs de l’infraction soient réunis :
- Un comportement harcelant caractérisé par des nuisances répétitives ou incessantes
- Un préjudice constitué par l’atteinte grave et réelle à la tranquillité de la personne subissant le harcèlement
- Un lien causal entre le comportement harcelant et l’atteinte à la tranquillité de la personne qui le subi
- Une preuve que le harceleur savait que son comportement porterait atteinte à la tranquillité de la victime
Des associations engagées
L’association « Marion, la main tendue » fondée par Nora Fraisse, mère de Marion Fraisse martyre du harcèlement scolaire et du cyber-harcèlement , qui intervient dans les écoles afin de sensibiliser les jeunes, proposer aux victimes une prise en charge complète et gratuite mais aussi d’apporter une aide aux harceleurs afin que ces derniers sortent de la spirale négative et de la marginalisation dans laquelle leur statut de harceleur les a mis.
Autre exemple de structure engagée dans la lutte contre le harcèlement scolaire l’association « HUGO ! » fondée par Hugo Martinez qui a lui-même vécu le harcèlement scolaire pendant 12 ans et qui souhaite désormais aider et accompagner les victimes de harcèlement dans leur reconstruction notamment par la pratique artistique et sportive.
Deux honorables exemples de victimes directes et indirectes du harcèlement, qui ont fait de la lutte contre ce fléau leur cheval de bataille.
Contacts utiles :
Numéro vert « NON AU HARCÈLEMENT» : 3020
Ouvert du lundi au vendredi de 9h à 20h et le samedi de 9h à 18h (sauf les jours fériés)
Si le harcèlement a lieu sur internet :
N° VERT « NET ÉCOUTE » : 0800 200 000
Gratuit, anonyme, confidentiel et ouvert du lundi au vendredi de 9h à 19h