Disponible depuis début avril sur la plupart des plateformes de podcasts, Homo-sociologicus vous parle de sociologie ! Ce format permet de rendre la sociologie et les sciences sociales accessibles à toutes et tous. Voici l’interview de son créateur, Baptiste, étudiant en master de sociologie à Sciences po Strasbourg.
Q : Qui es-tu, et quelles sont les raisons pour lesquelles tu as décidé de créer ce podcast Homo-Sociologicus ?
R : Je m’appelle Baptiste, j’ai 22 ans et je suis étudiant à Sciences Po Strasbourg dans un master qui traite principalement de la sociologie, mais qui s’intéresse globalement aux sciences sociales.
Cela faisait un moment que j’avais envie de créer quelque chose et je m’intéressais beaucoup au format Podcast, j’en étais un gros consommateur. J’ai donc fouillé les concepts que je pouvais utiliser sur plein de sujets, certains très différents de la socio ! Je crois que ma première idée de podcast c’était une émission autour du sport, aller à la rencontre des sportifs du quotidien, mais finalement je ne me suis pas lancé et j’ai laissé mûrir l’idée quelques mois. En parallèle de ça, mes études se sont spécialisées dans la socio. Pour Homo-Sociologicus, le déclic est venu en regardant la télé, une émission sur une chaîne d’infos en continu qui faisait un débat sur la méritocratie en France, et aucun des invités ou des chroniqueurs ne parlaient des travaux de Pierre Bourdieu et de Jean-Claude Passeron, qui ont écrit un livre (Les Héritiers) vraiment très éclairant sur les inégalités sociales, économiques et leurs répercussions dans le monde scolaire. J’ai été vraiment choqué par cette émission, les chroniqueurs se posaient les mêmes questions que Bourdieu et Passeron, mais eux avaient apporté des réponses à ces questions avec une analyse scientifique rigoureuse dès 1968 !
Je me suis dit que les débats tournaient en rond, qu’on ne pouvait pas vraiment avancer dans la société si on ne prenait pas en compte les recherches des chercheurs, notamment en sciences sociales pour les débats de société. En creusant dans mes relations, hors de mon école, je me suis aperçu que la socio était assez inconnue et que les concepts de base, que je trouve fondamentaux, n’étaient pas du tout acquis ni même connus. Donc très modestement je me suis dit qu’il fallait rendre la connaissance accessible, gratuite et facilement trouvable. C’est comme ça que j’ai fait Homo-Sociologicus.
Comment vas tu construire un épisode d’Homo-Sociologicus, par exemple, pour l’épisode 2 sur Goffman, comment vas-tu gérer la durée du podcast et les informations pertinentes à diffuser ?
La construction d’un épisode se fait en trois étapes. La première c’est la recherche d’infos, donc je vais prendre toutes les données et analyses que j’ai sur l’étude que je vais mettre en avant dans l’épisode. Je trouve mes sources dans les cours, ou dans des analyses annexes que je trouve principalement sur Cairn.
Ensuite, la deuxième étape c’est la rédaction. Je vais relier de manière logique toutes les infos que j’ai récoltées et les mettre en forme. Donc je vais essayer de faire une petite intro, une conclusion à la fin et surtout je vais essayer de trouver des formules orales que je vais pouvoir prononcer quand je m’enregistrerai. Je sais qu’avec mon débit de parole, mon script doit faire autour de six pages sur Word, c’est ce qui me permet de faire toujours des épisodes de la même longueur, en théorie du moins.
Après, la dernière étape c’est celle de l’enregistrement, donc je lis le script que j’ai écrit en m’enregistrant, et ensuite je fais du montage audio dans la foulée. Après ça, l’épisode peut être posté !
Existe-il un lien, un fil conducteur entre tous les épisodes ? Comment vas-tu relier le premier épisode avec le second, le second avec le troisième et ainsi de suite ?
Le fil conducteur de cette saison 1 c’est vraiment la découverte de toutes les bases et de tous les concepts fondamentaux pour pouvoir aller plus loin dans la sociologie. L’idée était vraiment que n’importe qui, même un débutant puisse prendre du plaisir en écoutant ce podcast. Ensuite, au niveau de l’architecture des épisodes, on va dire que chaque épisode est basé sur une étude précise et que donc il y a la leçon de l’ouvrage mais aussi une leçon plus générale qu’il faut principalement retenir. Pour l’épisode 1, sur Hoggart et les classes populaires, la conclusion de son ouvrage est que les individus adoptent des comportements liés à leur structure sociale, et qu’ils jugent péjorativement les comportements des personnes issues d’une autre structure, le fameux ethnocentrisme de classe. La leçon plus globale que j’ai essayé de faire comprendre c’est qu’il faut apprendre à se connaître avant de connaître l’autre.
Pourquoi les titres des épisodes sont systématiquement des questions ?
On définit souvent les sciences sociales comme des sciences qui cherchent à comprendre comment les institutions fonctionnent, comment se déroulent les interactions entre les personnes. Donc la sociologie c’est une science qui pose des questions. Sur elle-même et sur ce qui l’entoure. Et puis le titre, d’un point de vue marketing, c’est la première chose que l’auditeur voit, donc il faut que ça soit attractif et stimulant. Avec mes titres, parfois un peu provocateurs, j’essaie d’attirer les auditeurs et de rester dans cet esprit « sciences sociales ».
Quel est ton objectif à travers ce podcast, et à quel public s’adresse-t-il ?
L’objectif premier est de mettre le pied à l’étrier sociologique pour le maximum de personne possible. Faire découvrir cette science, ces auteurs et les grandes théories pour que l’on puisse mieux comprendre comment fonctionnent les institutions, nos interactions, les comportements de certaines personnes. Le public est donc le plus large possible, le format podcast permet de casser pas mal de barrières comme le prix, ou le temps demandé, à la différence d’un livre par exemple. Donc, tout le monde est ciblé, même si mon cœur de cible reste les étudiants, qui sont plus habitués au format podcast et aux applis sur lesquels ils se trouvent.
Que penses-tu du rôle de la sociologie dans nos sociétés contemporaines, et de son impact ?
C’est essentiel ! La sociologie, et les sciences sociales au sens large, ont pour mission de comprendre les phénomènes. Souvent ce sont des phénomènes assez communs, que tout le monde connaît et sur lesquels tout le monde a un avis. Le sociologue doit donc parfois déconstruire des idées reçues pour chercher la véritable cause d’un phénomène et comprendre ce qu’il provoque. Les exemples sont nombreux mais les travaux de Durkheim sur le suicide sont très illustratifs. Sans lui, on penserait encore que le suicide vient de causes individuelles, internes à l’individu et non de causes sociales. Il y a donc la volonté de comprendre, et puis, personnellement, je pense qu’en dévoilant la conflictualité des rapports sociaux, en démasquant les inégalités on peut changer le monde social, et corriger ces problèmes.
Enfin, comment vois-tu le futur d’Homo-sociologicus ? Une prochaine saison 2 ?
La saison 1 est vraiment basée sur les bases nécessaires à la compréhension des grands débats, pour avoir les premières clés pour mener sa propre analyse sur le monde autour de nous. Pour la saison 2 j’aimerais faire quelque chose de plus spécifique, avec peut-être, des épisodes axés sur des branches de la sociologie : un épisode sur la sociologie du droit, un sur la sociologie politique, la sociologie de la police, la sociologie du travail… Mais c’est encore en raisonnement et rien n’est décidé. J’aimerais bien faire intervenir d’autres personnes, des sociologues pour qu’ils et elles viennent directement nous parler de leurs travaux et de leurs conclusions. Reste à savoir si c’est faisable !
Ce podcast est à retrouver ici : https://anchor.fm/dr-bapt