Le 25 mars, le campement qui se trouvait place de La République dans le 2e arrondissement de Lyon a été démonté. Il témoigne de la difficulté à prendre en charge certains SDF et divise les élus concernant les solutions à apporter.
« The End… enfin ! », postait sur son compte twitter le 25 mars, Pierre Oliver, le maire LR du 2e arrondissement de Lyon, en postant une photo de la place de la République pour témoigner que le campement de SDF qui se trouvait au 44, place de la République, juste devant le Printemps, venait d’être démonté. Ce campement était installé depuis juin 2020. Les riverains et les commerçants se plaignaient de nuisances.
« Les commerçants avaient été très tolérants, mais il y a fini par avoir une exaspération », confirme Sandrine Runel, l’adjointe de la ville de Lyon déléguée aux solidarités et à l’inclusion sociale.
La décision de démonter ce campement fait de bric et de broc et qui était composé de 6 tentes est intervenue après un diagnostic réalisé auprès des sans-abri. « Ça faisait longtemps qu’on travaillait dessus, cela a été très long et très complexe. La situation a beaucoup évolué. Au début il y avait 5 ou 6 personnes, et puis, elles sont parties et ont été remplacées par deux nouvelles personnes, il a fallu reprendre tout le suivi. On a passé trois semaines à discuter avec ces deux personnes, l’une d’entre elle était italienne, ce qui a compliqué les démarches administratives. Elle avait deux lapins, ce qui rendait la prise en charge plus complexe également », confie Sandrine Runel.
Le diagnostic
« Le SAMU est venu les chercher, les services de nettoyage de la Métropole sont ensuite passés », témoigne Jean-Stéphane Chaillet, le Premier adjoint du 2e arrondissement qui en plus d’être en charge des déplacements urbains a une double casquette « sécurité » et « solidarité ». Depuis l’un est logé dans un appartement, l’autre est dans un hôtel.
Jean-Stéphane Chaillet ne se fait guère d’illusions. « Sous l’ancien mandat, il y avait déjà eu une installation de tout un tas de personnes sur l’hypercentre. Les sans-abri de la place de la République avaient déjà été relogés dans des campements et des hôtels. Fin 2021, ils ont été virés des hôtels et sont retournés place de la République. La mise à l’abri n’est qu’une étape. Immédiatement après, il faut un encadrement social immédiat (…) Si on n’y arrive pas, ils reviendront », déclare-t-il.
La personne qui est logée à l’hôtel aurait déjà eu des complications. « Ce sont des personnes avec des addictions, ce n’est pas très adapté à une solution en hôtel », reconnait Sandrine Runel, d’autant que cette personne est défavorablement connue des services sociaux. « Il a besoin d’accompagnement social, mais il refuse le collectif », ajoute l’adjointe aux solidarités et à l’inclusion sociale.
Jean-Stéphane Chaillet, qui se revendique de la droite sociale, affirme que « 40 % des personnes à la rue ont des problèmes psychiatriques ». « Le psychiatre Nicolas Franck (chef de pôle à l’hôpital du Vinatier, NDLR.) nous a expliqué comment il fallait aborder les personnes en déshérence. En tant qu’élu, je m’enrichis auprès des experts et je vais au-devant des sans-abri », précise-t-il.
Les deux adjoints sont d’accord sur le diagnostic, mais leurs avis diffèrent sur les solutions à apporter.
Les solutions à apporter
« Le nouvel exécutif a signé la Déclaration des droits des personnes sans abri, avec la fondation Abbé Pierre, dans laquelle la Ville s’engage à laisser les gens à la rue quand ils ne veulent pas être pris en charge (…) C’est un public hyper fragile, dur à gérer, mais ce n’est pas une fatalité. Il faut voir au niveau de la loi si on ne pourrait pas les hospitaliser. Je me demande s’il n’y a pas non-assistance à personne en danger », questionne le Premier adjoint à la mairie du 2e.
« La Déclaration des droits des personnes sans abris réaffirme les droits fondamentaux des personnes qui sont à la rue, elles ont le droit à la mobilité. On ne va pas partir à la chasse aux sans-abri, même si on ne se satisfait pas qu’ils soient dans des tentes », répond Sandrine Runel.
« On souhaite mettre en place à la Ville un dispositif adapté comme on l’a fait à Caluire, avec les Caravanes à Denuzière. Des jeunes vivent dans des caravanes, ils ont défini des règles de vie commune. Ce dispositif qui existe depuis un an dispose de six places et 16 personnes y sont passées. Certaines parmi elles ont vu leur situation s’améliorer et ont pu en partir », ajoute-t-elle.
Jean-Stéphane Chaillet et Sandrine Runel ont des avis qui diffèrent sur les solutions à apporter et il ne semble pas y avoir de solution miracle pour faire face à des situations complexes. Des situations qui risquent d’être plus nombreuses avec la fin de la trêve hivernale en cette journée du 31 mars. Les expulsions vont pouvoir reprendre à partir du 1er avril, alors qu’une vague de froid est attendue à Lyon ce week-end. Un rassemblement « pour un logement digne » est d’ailleurs prévu ce jeudi à 18 h sur l’esplanade Moncey, dans le 3e arrondissement de Lyon. Les organisateurs dénoncent notamment la fin de cette trêve hivernale.