Le mardi 31 décembre, le Centre Léon Bérard, le centre de lutte contre le Cancer en Rhône-Alpes, a organisé une visio-conférence dans le cadre de la Journée mondiale sans tabac. Une tabacologue a parlé de la cigarette électronique et est revenue sur les méfaits du tabac.
Dans le cadre de la Journée mondiale sans tabac, le Centre Léon Bérard, qui est le centre de lutte contre le cancer de Rhône-Alpes, a organisé une visioconférence intitulée « S’informer et échanger sur la cigarette électronique. » Les internautes ont pu échanger avec Mme Dominique Triviaux, médecin tabacologue, qui travaille au Centre. Elle a répondu aux questions que se posaient les participants sur la cigarette électronique et elle a également abordé dans les grandes largeurs les méfaits de la “clope”. Est-ce que la cigarette électronique est aussi dangereuse que le tabac ? Peut-on se sevrer du tabac grâce à elle ? Les groupes d’auto-support sont-ils efficaces pour se sevrer de la nicotine ? Autant de questions auxquelles Mme Triviaux a répondu avec dynamisme.
Le tabac est le principal risque évitable de cancer
Il convient tout d’abord de rappeler que chaque année, la cigarette tue 75 000 personnes en France, dont 46 000 par cancer.
« 90 % des cancers du poumon sont liés à la cigarette. Donc si on fait disparaître la cigarette on fait disparaitre 90 % des cancers du poumon, mais aussi 70 % des cancers de la bouche, de l’œsophage ou de la sphère ORL et la moitié des cancers de la vessie », a expliqué Mme Triviaux.
Les cancers liés à la cigarette représenteraient plus de 30 % de l’ensemble des cancers. « C’est de loin le premier facteur à risque évitable devant d’autres substances comme les polluants ou les pesticides », a-t-elle précisé.
Selon Mme Triviaux, « il n’y a pas de petit tabagisme, on peut mourir d’un cancer des poumons en ayant fumé quelques cigarettes par jour pendant quelques années. »
Dominique Triviaux estime que la grande priorité est de sortir de la cigarette et des produits nocifs qu’elle contient.
La dépendance à la nicotine
La difficulté c’est évidemment de sortir de la dépendance qu’elle provoque.
« Dans la dépendance au tabac, il y a une triple dépendance : une dépendance physique à la nicotine, une dépendance psychologique et comportementale, l’association de la cigarette avec des temps émotionnels ou des rites, comme le café », a affirmé Mme Triviaux.
« Cela relève de la mémoire procédurale, ça ne s’efface pas, c’est comme le vélo, on sait en refaire des années après. Il n’y a pas de traitements pour cela », a-t-elle prévenu avant d’ajouter : « la cigarette a fait partie de la vie de la personne et elle en fera toujours partie, c’est comme la perte d’un être cher… On s’en souvient, on ne l’oublie jamais. Ce n’est pas grave, ça prouve qu’on a de la mémoire ».
Selon Dominique Triviaux il faut s’armer de « persévérance » et se « donner du temps ». Les groupes d’auto-support peuvent également apporter une « grande aide ».
« Les substituts nicotiniques permettent d’arrêter dans le confort, ils sont très efficaces quand ils sont bien dosés », a souligné Mme Triviaux, qui a également souhaité tordre le coup à quelques idées reçues.
« Contrairement à ce qu’on pense, il n’est pas interdit de fumer quand on a des patchs, c’est un signe qu’ils ne sont pas assez dosés. Il vaut mieux fumer un peu avec, que de les enlever et de fumer plus », a-t-elle préconisé avant de préciser qu’on « ne doit pas souffrir d’un manque de nicotine en 2022 », car cela créerait notamment « des angoisses ».
La cigarette électronique n’est pas la panacée pour sortir du tabac
Pour arrêter la cigarette, certains utilisent des patchs, d’autres passent à la cigarette électronique.
Elle peut être utile pour sortir du tabac, mais elle ne résout pas le problème de la dépendance. « Certaines personnes arrivent à se sevrer en baissant le taux de nicotine de leur e-liquide, mais il est préférable d’avoir recours à des patchs qui mènent à un sevrage plus sûr », a recommandé la tabacologue.
Elle a précisé que « parmi les personnes qui arrêtent la cigarette, il y en a 80 % qui passent à la cigarette électronique, mais qui restent accro, alors que les autres sont sevrées quand elles se font bien accompagner».
Selon Dominique Triviaux, « la cigarette est moins nocive que le tabac sur le court terme, le problème c’est que pour l’instant on n’a qu’une dizaine d’années de recul sur la cigarette électronique ; donc, concernant ses effets à long terme, nous avons de grosses interrogations. »
Toujours est-il que « l’être humain n’est pas fait pour s’envoyer du Propylène glycol ou de la glycérine », a constaté Mme Triviaux, qui préconise toutefois aux vapoteurs de se fournir dans des magasins spécialisés et d’éviter les tabacs ou Internet.
« Être vapo-fumeur, c’est rester fumeur et cumuler les dangers du tabac et du vapotage », a-t-elle alerté.
La tabacologue a également abordé le « problème des Pufs, qui sont des cigarettes électroniques jetables, avec un marketing clairement destiné aux jeunes ». « Mais le gouvernement s’est positionné avec une interdiction des ventes », a remarqué Mme Triviaux.
Le tabagisme passif
Enfin, elle a également évoqué la dangerosité du tabagisme passif.
Concernant « la vap’ on ne sait pas trop, mais c’est sûr que ce n’est pas dans les mêmes proportions que la fumée du tabac », a-t-elle déclaré avant de souligner que « le pire c’est la fumée de cigarette qui se consume dans le cendrier ».
Enfin, Mme Triviaux a abordé un problème méconnu : « la toxicité des appartements ». « La fumée qui se dépose sur les murs, les supports, va réagir à leur contact et être remise dans l’air pendant six mois », a-t-elle indiqué avant d’insister sur le fait qu’« il faut absolument éviter de fumer dans les espaces clos ».