Mercredi soir, les députés de la majorité présidentielle, ainsi que les Républicains et le Rassemblement national, ont rejeté tous les amendements déposés par les partis de la Nupes pour augmenter le salaire minimum à 1.500 € par mois.
Depuis lundi, les débats font rage à l’Assemblée nationale à propos du projet de loi « Mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat ». La majorité s’attendait à des débats difficiles, c’est le cas. Les votes sont très divisés et aucun compromis ne semble émerger entre la gauche et la droite. Mercredi soir, ce clivage s’est illustré par les discussions autour d’un des projets phares de la campagne de Jean-Luc Mélenchon aux présidentielles, puis de la Nupes aux législatives : l’augmentation du SMIC à 1.500€ nets par mois, alors qu’il est actuellement d’environ 1.300€, soit une hausse de 12 %.
Résultat des votes, les amendements proposés en ce sens par les partis de la Nupes, la France insoumise (LFI), le Parti socialiste (PS), le Parti communiste (PCF) et Europe Écologie les Verts (EELV), ont tous été rejetés, à 257 voix contre, 121 pour et 4 abstentions. Les Républicains et le Rassemblement national, qui avaient déjà voté conjointement à la République en Marche et ses alliés pour la plupart des votes précédents, ont renouvelé leur alliance avec la majorité présidentielle contre la hausse du SMIC.
Colère à gauche contre la collusion à droite
Les réactions scandalisées ne se sont pas fait attendre au sein de la Nupes. Au premier rang, Jean-Luc Mélenchon a publié un tweet incendiaire, qualifiant l’alliance entre LREM et le RN de « pire droite de l’Europe ». Louis Boyard a également dénoncé « le vrai visage du RN qui vote contre les intérêts des plus pauvres » et « le vrai visage de LREM qui s’allie avec le RN pour protéger les intérêts des plus riches ». On retrouve des commentaires similaires du côté du PCF, où Fabien Roussel s’indigne : « Honte au RN qui se présente comme un des défenseurs des classes populaires et vote contre la hausse du SMIC ». Le RN, qui proposait une suppression des cotisations pour les entreprises afin d’augmenter le salaire net, a en effet choisi de se rallier au projet de primes de la majorité plutôt qu’à celui de hausse des salaires de la gauche. Pour se justifier, Marine Le Pen a répliqué qu’il s’agissait de « ne pas être sectaire » et de « penser à l’intérêt des salariés », mettant en avant le compromis, dans sa stratégie d’intégration du parti au jeu politique.
Deux visions incompatibles
Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée a dit en avoir assez des « invectives et les insultes qui ne cessent de fuser [de la partie gauche] de l’hémicycle » lors des débats. Mais au-delà des combats de coqs, ce sont deux visions radicalement incompatibles qui s’opposent à l’Assemblée. D’un côté, le projet gouvernemental mise sur les primes, et notamment la « prime Macron », et le triplement de son plafond, passant de 1000€ ou 2000€ avec accord, à 3000€ et 6000€ maximum. Pour les partisans de cette stratégie, augmenter le SMIC menacerait les entreprises, et entraînerait une spirale inflationnistes, les producteurs cherchant à conserver leurs marges face à l’augmentation de leurs coûts.
De l’autre côté, la Nupes souhaite la hausse du salaire minimum, qui serait payée par les entreprises, et qui comprendrait les cotisations sociales, à l’heure où les primes en sont exonérées et sont prises en charge par l’État. Elle met en avant une réinjection de ce salaire dans l’économie par les ménages les plus pauvres qui épargnent peu, et la pérennité de cette mesure. Pour éviter les problèmes pointés du doigt par le camp adverse, la gauche propose en plus une caisse de péréquation pour aider les TPE et PME à payer cette hausse, et un blocage des prix. Mais au vu de la configuration actuelle de l’Assemblée, c’est clairement le premier projet qui l’emporte, le triplement du plafond de la « prime Macron » ayant été adopté mardi soir sur les mêmes alliances qui ont rejeté le SMIC à 1.500€.