Une enquête canadienne parue le 12 aout dans The Lancet affirme que les vaccins à ARN Messager seraient « sans danger » pendant la grossesse, même si cette étude ne porte que sur les 7 jours suivant la vaccination. Quand on y regarde de plus près, les conclusions des auteurs ne correspondent pas forcément aux chiffres publiés. Dans la rubrique « déclaration d’intérêt », cinq contributeurs de cette étude déclarent avoir déjà participé à un projet financé par Pfizer. Trois d’entre eux affirment également avoir participé à un projet financé par Moderna.
Ce vendredi 12 aout, The Lancet a publié une étude intitulée « Sécurité des vaccins contre la COVID-19 pendant la grossesse : une étude de cohorte du Réseau national canadien sur la sécurité des vaccins (CANVAS) », cofinancée par l’Institut de recherche en santé du Canada et l’Agence de la santé publique du Canada.
Partant du constat que « La pandémie de COVID-19 a touché de manière disproportionnée les femmes enceintes, qui présentent un risque plus élevé de maladie grave par rapport aux personnes non enceintes du même âge », une équipe composée de quatorze scientifiques a souhaité mener cette étude qui visait à « déterminer la fréquence et la nature des événements de santé importants chez les femmes enceintes après la vaccination contre la COVID-19, par rapport aux témoins enceintes non vaccinées et aux personnes non enceintes vaccinées ».
Même si cette enquête porte seulement sur les sept jours suivant l’injection de vaccin, les auteurs de cette étude affirment que les vaccins à ARN Messager seraient « sans danger » pendant la grossesse, comme le confirme The Lancet, dans un tweet publié le même jour.
Une étude portant sur un échantillon de 200 000 femmes
Environ 20000 femmes enceintes et non enceintes, vaccinées et non vaccinées, âgées de 15 à 49 ans, ont participé à cette étude.
« Les données ont été recueillies principalement au moyen d’une enquête autodéclarée après les deux doses de vaccin. »
Les participantes devaient signaler des événements de santé importants survenus dans les 7 jours suivant la vaccination ou au cours des 7 derniers jours pour les personnes non vaccinées.
Parmi elles, 191 360 femmes âgées de 15 à 49 ans avaient indiqué avoir reçu une première dose de vaccin et 94 937 déclaraient avoir reçu deux doses. 180 388 ont reçu une première dose de vaccin à ARN messager, 94 262 ont reçu une deuxième dose de vaccin utilisant cette technologie. 5597 participantes ayant reçu une première dose de vaccin à ARN messager étaient enceintes. 3138 femmes enceintes ont reçu une deuxième dose de vaccin utilisant cette technologie. Deux types de vaccins à ARN différents ont été injectés : BNT162b2 (Pfizer) et mRNA-1273 (Moderna). Enfin l’étude comptait un groupe témoin non vacciné dans lequel on dénombrait 6179 participants, « 339 étaient enceintes et 5840 n’étaient pas enceintes ».
Des conclusions qui ne correspondent pas aux chiffres indiqués
Il est indiqué dans l’étude que « Les femmes enceintes vaccinées présentaient un risque accru d’événement de santé important dans les 7 jours suivant la deuxième dose de mRNA-1273 par par rapport aux femmes enceintes non vaccinées, mais pas après la première dose d’ARNm-1273 ou toute dose de BNT162b2 ». Or ce n’est pas ce qu’on constate dans le tableau figurant dans cette enquête.
Parmi les 5597 femmes enceintes vaccinées ayant reçu une dose de vaccin à ARN, 4% (4% avec le vaccin BNT162B2, 4,1% pour le vaccin mRNA-1273) ont signalé un problème important de santé après avoir reçu la première dose et 7,3% (4,2% pour le vaccin BNT162b2 et 12,1% pour le vaccin mRNA-1273) des femmes ayant reçu une deuxième dose de Vaccin utilisant cette technologie ont déclaré un problème significatif de santé, alors qu’elles n’étaient que 3,2% à le faire dans le groupe témoin des femmes enceintes non-vaccinées.
Il est également indiqué que « Les femmes enceintes vaccinées présentaient une diminution du risque d’événement de santé significatif par rapport aux femmes non enceintes vaccinées après la première dose et la deuxième dose de toute vaccination par ARNm », ce que les chiffres démontrent effectivement puisque les femmes vaccinées qui n’étaient pas enceintes étaient 6,3% à déclarer un problème de santé significatif après la première dose et 11,3% après la seconde dose.
Les chiffres montrent que les femmes vaccinées avec des vaccins à ARN messager ont déclaré un peu plus de problèmes significatifs de santé que le groupe témoin de femmes enceintes non vaccinées, mais moins que les femmes enceintes vaccinées qui n’étaient pas enceintes.
L’interprétation des scientifiques qui ont participé à cette enquête est pourtant la suivante : « Les vaccins à ARNm COVID-19 ont un bon profil d’innocuité pendant la grossesse ». Selon eux « Ces données peuvent être utilisées pour informer de manière appropriée les femmes enceintes ».
Certains des auteurs de l’enquête déclarent avoir participé à des projets financés par Pfizer et Moderna
Parmi les 14 scientifiques qui ont collaboré à cette enquête, il est intéressant de noter que sept d’entre eux ont fait une déclaration d’intérêt. Manish Sadarangani, Otto G Vanderkooi, James D Kellner, Allison Mc Geer et Gaston De Serres ont déclaré avoir déjà participé à un projet financé par Pfizer. Manish Sadarangani, James D Kellner et Allison Mc Geer ont par ailleurs déclaré avoir participé à un projet financé par Moderna. Chacune de ces déclarations est suivie de la mention : « Tous les fonds ont été versés à son institut et il n’a reçu aucun paiement personnel ».
Pour rappel, Moderna et Pfizer sont à l’origine des vaccins à ARNMessager.
Le 15 février dernier, lors d’un bulletin sur la chaine YouTube de l’IHU Méditérannée, le Professeur Raoult déclarait : « Une équipe de Niçois a montré le degré auquel les leaders d’opinion, les médecins reçoivent des financements de l’industrie pharmaceutique et ils disent qu’il n’y a pas de groupes, de sociétés savantes rédigeant des higlights, dans lesquelles il n’y a pas au moins un des participants, qui n’ai pas reçu de financement par l’Industrie pharmaceutique ». « Nous avons là des problèmes sociaux qui devront bien être réglés par la politique, par le comité d’éthique, pour regarder ça en face (…) Si les gens ont des conflits d’intérêts, il ne suffit pas de les déclarer. »
L’enquête canadienne publiée sur le site du Lancet a été largement reprise dans les médias. Depuis le 20 juillet, le ministère de la Santé recommande la vaccination pour les femmes enceintes, dès le premier trimestre de la grossesse.