La pénurie de médicaments est un sujet de préoccupation majeur, non seulement pour les professionnels de santé, mais aussi pour le grand public. L’hiver dernier, des produits essentiels comme l’amoxicilline et le paracétamol ont fait défaut sur les étagères des pharmacies. Le double choc d’une triple épidémie – Covid-19, grippe, bronchiolite – combiné à des tensions mondiales d’approvisionnement a mis le système à rude épreuve.
Les racines de ce problème sont complexes. D’une part, le marché mondial des médicaments s’est contracté autour de quelques producteurs clés. En quête de coûts réduits, les fabricants ont massivement délocalisé leur production en Asie, créant une dépendance inquiétante pour le reste du monde. De surcroît, la guerre en Ukraine, fournisseur de composants essentiels à l’emballage des médicaments, a jeté de l’huile sur le feu.
Aujourd’hui, les pharmaciens sonnent à nouveau l’alarme. L’histoire pourrait bien se répéter. « Nos demandes pendant l’hiver se focaliseront sur certaines molécules déjà sous tension », confirme Bruno Maleine, représentant des officines.
L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a enregistré plus de 3 700 médicaments en situation de pénurie ou sous tension en 2022. Le chiffre pour 2023 pourrait être encore plus alarmant, avec 3 500 signalements de rupture à la fin d’août.
Toutefois, les autorités tentent de calmer le jeu. Christelle Ratignier-Carbonneil, de l’ANSM, insiste sur le fait que les stocks pour les molécules utilisées pendant l’hiver sont en place. Néanmoins, elle reconnaît des « disparités d’accès » dans certaines pharmacies.
Face à cette situation, des mesures ont été prises. Le ministère de la Santé cherche à redistribuer équitablement les stocks entre les pharmacies. L’ANSM, de son côté, a conçu un plan de préparation spécifique pour les épidémies hivernales. Le gouvernement explore également d’autres pistes, telles que la relocalisation de la production de médicaments essentiels en France.
L’Union européenne n’est pas en reste et propose un mécanisme européen de solidarité volontaire pour les médicaments. D’autres mesures, comme l’extension de la durée de conservation de certaines molécules, sont également à l’étude.
Mais ces solutions seront-elles suffisantes? « Il faut s’interroger sur la rentabilité des médicaments pour les industriels », suggère Bruno Maleine. Le modèle actuel de distribution, ainsi que la conception même des médicaments, devront être repensés.
L’intensité des épidémies cet hiver demeure l’inconnue principale. Le gouvernement mise beaucoup sur la vaccination contre le Covid-19 et la grippe. Cependant, les doses du nouveau traitement contre la bronchiolite sont déjà en rupture de stock. Une autre pénurie à ajouter à la liste.