Cinq ans après les manifestations des Gilets jaunes, une enquête de l’AFP révèle qu’aucun policier ou gendarme n’a été condamné pour les 23 cas d’éborgnement survenus entre 2018 et 2019. Parmi ces victimes, un seul plaignant a bénéficié d’un procès, mais sans obtenir de condamnation.
L’enquête de l’AFP a contacté toutes les victimes qui ont porté plainte après avoir été blessées par des tirs de LBD ou des grenades. Ces victimes, allant de manifestants à de simples passants, voient aujourd’hui leurs dossiers dans une impasse judiciaire. Selon les informations, six classements sans suite et deux non-lieux ont déjà été prononcés.
Parmi les cas les plus notables, celui de Hedi Bahrini, qui a perdu l’œil gauche lors d’une manifestation au Puy-en-Velay. Bahrini, 45 ans, a appris en 2022 le décès du gendarme auteur du tir. Sa démarche pour obtenir une indemnisation est toujours en cours auprès du tribunal administratif de Clermont-Ferrand.
D’autres victimes, comme Alexandre Frey, touché par un tir de LBD à Paris, expriment leur frustration face au silence entourant l’évolution de leur dossier. Certaines affaires, cependant, semblent progresser. C’est le cas de Jérôme Rodrigues, figure des Gilets jaunes, dont l’éborgnement pourrait être jugé par la cour criminelle départementale de Paris. Deux fonctionnaires sont actuellement mis en examen dans cette affaire.
Un seul cas a mené à un procès, celui de Jean-Philippe, un lycéen éborgné à Béziers en 2018. Le policier impliqué a été relaxé en 2023, décision suivie d’un appel du ministère public. Face à ces blocages, certains cherchent réparation auprès de la justice administrative ou de la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions (Civi).
Le mouvement des Gilets jaunes a été marqué par des blessures importantes, tant du côté des manifestants que des forces de l’ordre, avec respectivement 2 500 et 1 800 blessés selon le ministère de l’Intérieur. Les victimes d’éborgnements se retrouvent souvent dans l’association « Mutilés pour l’exemple », continuant leur quête de justice et de reconnaissance.